• Nos mentalités et traditions freinent notre développement économique

    Nos mentalités et traditions freinent notre développement économiqueMonsieur Sassou Nguesso aura beau pavoiser sur l'accession du Congo à l'initiative PPTE(Pays pauvres très endettés), une chose est sûre, cela ne changera rien à court, moyen et long terme à la vie de la population congolaise.

    Monsieur Sassou Nguesso aura beau pavoiser sur l'accession du Congo à l'initiative PPTE(Pays pauvres très endettés), une chose est sûre, cela ne changera rien à court, moyen et long terme à la vie de la population congolaise.

    Je peux même affirmer sans risque de me tromper que si la dette congolaise était effacée en totalité, il n y aurait aucun impact sur la vie quotidienne des citoyens congolais avec le régime actuel (ou un autre régime) dont les pratiques seraient proches de celles de Sassou Nguesso et de son clan.

    Certains esprits légers diront que je m'enferme dans une opposition jusqu'au boutiste au point d'être si pessimiste. Et pourtant c'est la vérité et je vais essayer de vous démontrer pourquoi je pense que le salut du Congo et de l'Afrique ne peut venir de l'effacement de sa dette.

    Il est très courant au Congo de rechercher les causes du sous développement dans les aspects historiques que sont la traite négrière, la colonisation, le néocolonialisme, la détérioration des termes de l'échange etc.…

    Toutes ces causes sont reprises en refrain par l'élite congolaise qui ne voit derrière le sous développement qu'un complot de l'ancienne puissance coloniale qui se goinfre sur notre dos et nous laissent dans une situation tragique.

    " Nous sommes des victimes de la colonisation, donc les Français nous doivent des indemnités " Tel est le credo d'une partie de l'élite congolaise qui n'a comme prisme d'analyse que la 'victimisation'.

    Loin de moi l'idée de nier les facteurs exogènes du sous développement que j'ai cités plus haut. Je pense même, que si ces facteurs disparaissaient, notre développement économique ne serait pas amorcé, car à côté des facteurs externes et internes (mauvaise gouvernance, corruption), il y'a des facteurs sociologiques plus pernicieux, donc plus difficiles à déceler, liés à notre culture et à nos mentalités qui nous éloignent inéluctablement de la route du développement.

    Nos traditions.

    Je suis souvent très étonné par le manque de culture démocratique de nos sociétés africaines où la liberté de penser (et d'action) est étouffée par des notions comme le droit d'aînesse, l'obéissance au chef, au grand frère, au père etc.…

    Nos traditions ne sont pas des lieux libertaires où l'on peut faire et dire n'importe quoi. La tradition s'emploie à pétrifier les consciences. Quand vous essayez de sortir de cet étouffement, on vous rétorque que vous êtes un aliéné, que l'Afrique a ses propres lois et valeurs à suivre. Je comprends alors pourquoi la démocratie a du mal à s'enraciner dans nos sociétés.

    Je sens en Afrique une sorte de rejet de tout ce qui a attrait à l'occident et notamment à sa culture des droits de l'homme. En Afrique l'individu n'existe que par le groupe, le clan ou l'ethnie. Je sens aussi un rejet de la technologie occidentale. On est prêt à utiliser la voiture, le téléphone bref tous les éléments de la modernité mais on refuse de se l'approprier. Ces rejets sont justifiés au nom d'un particularisme traditionnel que nous avons trop tendance à revendiquer alors qu'il est responsable de notre misère.

    C'est au nom de ces traditions d'obéissances, de respect dû au chef que nous acceptons de subir la dictature de Sassou sans broncher. Et c'est même au nom de ces traditions que Jacques Chirac affirmait que " la démocratie était un luxe…pour l'Afrique "

    " Les exactions de la classe politique se nourrissent au contraire des sécrétions narcissiques, des sociétés africaines et reflètent en bonne logique, l'image étroite, autoritaire et carcérale de leur hygiénisme culturel " (Axelle Kabou : et si l'Afrique refusait le développement? " éditions l'Harmattan )

    L'éclosion d'un personnage comme Sassou Nguesso dans la sphère politique congolaise ne peut être que le reflet de notre culture. Ses méthodes de gestion du pays ne sont que le reflet de la manière dont nous gérons nos relations sociales.

    Si monsieur Sassou Nguesso était né en France et devenu président de ce pays, il aurait géré l'hexagone avec la rigueur que commande la culture occidentale. De même, si monsieur Chirac était congolais, sa gestion de l'état n'aurait pas été si différente de celle Sassou Nguesso actuellement.

    A côté de nos traditions, se sont greffées des habitudes héritées des années " post-indépendance " : La forte propension à la mendicité, le manque d'ardeur au travail, le goût des choses dérisoires (fête, cérémonies somptueuses), la bêtise, la cupidité, le retard systématique aux rendez-vous (le nègre étant fâché avec l'heure)…

    Incapable de construire un état depuis 40 ans, notre sécurité sociale est devenue la nomination d'un membre du clan à un poste important car dit on dans notre culture le grand frère aide ses petits frères, sœurs, cousins et cousines. C'est ainsi que les cabinets ministériels ressemblent plus à des conseils de famille qu'à des cercles de compétences. Les chefs d'entreprises embauchent en priorité sur des bases tribales au mépris de la compétence et de l'expérience des candidats.

    Nous vivons encore en Afrique sous le joug d'un " Totalitarisme traditionnel " que les institutions internationales comme le FMI, la banque mondiale et l'OMC ne peuvent mettre dans leurs indicateurs de performances.

    Les traditions congolaises en étouffant la libre pensée, étouffent la démocratie ; et en étouffant la libre entreprise, étouffent la créativité, la libération des énergies.

    Tant que la libre pensée ne sera pas encouragée comme norme dans la société congolaise, le développement de notre pays restera problématique.

    La dette sera réduite, mais nos traditions et nos mœurs seront là pour contrecarrer le développement attendu et nous demanderons à nouveau dans les prochaines années aux institutions internationales une réduction de dette.

    Un changement profond des mentalités doit s'engager pour qu'un début de développement prenne corps au Congo. Espérons que la misère organisée et entretenue (par le pouvoir en place) qui sévit actuellement dans notre pays entraînera ce profond changement de mentalité sur la libre pensée, la libre entreprise et un questionnement sur les aspects négatifs de nos traditions. Une remise en cause de notre société est nécessaire pour commencer à amorcer le développement du Congo. Sans elle, l'annulation de la dette sera de nul effet.

    Le fait religieux.

    La multiplication des sectes et notamment des églises dites 'réveillées' n'est pas un phénomène rassurant pour le développement économique du Congo. Avec des croyances tribales sur la sorcellerie, ces sectes dont l'obscurantisme pousse ses adhérents à croire que Dieu peut les transporter au Canada sans obtenir de visa, prennent un essor considérable au Congo. Elles poussent ses adeptes à croire que la solution aux problèmes du Congo viendra de Dieu et non du travail ; D'où le développement des jeux de hasard. Sûrement que la crise économique en est pour quelque chose.

    Mais l'idéologie diffusée par ces sectes me semble dangereuse. La plupart d'entre elles n'ont qu'un seul discours, 'Dieu pourvoira à vos besoins. Sassou Nguesso, c'est Dieu qui l'a mis là. Toute autorité vient de Dieu. Il ne sert à rien de se révolter, le temps de Dieu arrivera.'

    On peut donc comprendre pourquoi un pouvoir arrogant et fier de piller les richesses du pays n'est pas mis en difficulté, puisque le peuple congolais attend que Dieu s'en occupe. Or ne faudrait-il pas appliquer l'adage 'aide-toi et le ciel t'aidera' ?

    Cette irrationalité de la population fait perdurer le règne d'un homme qui aurait été démis de ses fonctions dans n'importe quelle démocratie digne de ce nom avec tous les scandales accumulés depuis plus de 20 ans.

    Dans un tel contexte religieux, le développement du pays ne réside plus dans la volonté du peuple de changer son destin mais plutôt dans l'attente d'un ordre divin qui sera mis en place avec le départ de Sassou Nguesso.

    Toute cette mentalité religieuse est un frein au développement que la réduction de la dette du Congo ne pourra régler.

    L'Afrique du 21e siècle doit sortir de son irrationalité habituelle pour entrer définitivement dans la voie du développement.

    Nous devons nous inspirer de la population polonaise des années 80, pourtant très croyante en Dieu, qui a réussi à changer le cours de son histoire en se mettant debout comme un seul homme pour combattre la dictature communiste incarnée par le général Wojciech Jaruzelski.

    Les méthodes managériales.

    Le troisième et dernier facteur sociologique qui nuit à notre développement est notre conception du management. Il est de notoriété publique que le congolais soit paresseux, il arrive toujours en retard au travail, il prend toujours son temps et préfère le temps de loisirs à celui du travail. Au Congo, on arrive au boulot à 10H on repart à 13H00.

    Le Congolais est sous payé par rapport au coût de la vie mais surpayé par rapport à sa productivité.

    Or il n y'aura pas de développement au Congo sans une augmentation de la productivité de notre travail.

    Les sociétés d'Etat et l'Etat ont fait faillite, cependant personne ne s'est posé la question sur les raisons de ce fiasco. Les raisons sont sûrement à rechercher dans ce que Axelle Kabou appelle " l'économie d'affection "

    En effet les fameux chefs d'entreprises congolais gèrent leurs affaires de manière purement traditionnelle sans tenir compte des normes occidentales d'efficacité, de profit, de rentabilité etc.… On se comporte avec ses salariés comme un despote à l'image des autorités politiques. On nomme des parents à des postes sans formations nécessaires. Toutes ces entreprises créées en général par les proches du clan présidentiel n'ont pas d'objectifs de croissance, de rentabilité ; La comptabilité est à peine tenue. Par contre 'l'ego social' du patron est au zénith au point que certains se sont permis par le passé de laver leur voiture au champagne ou à la bière la plus cher du marché. C'est cela les méthodes managériales au pays de Sassou Nguesso et du gas " pillage "

    Avec de telles méthodes de gestion, vous comprendrez que le développement du Congo ne peut dépendre seulement de l'annulation de sa dette.

    Pour réussir économiquement plusieurs choix s'imposent à nous : L'épuration des valeurs traditionnelles négatives, la prise de conscience que le développement dépend de la créativité et du travail (productivité) et non du temps que l'on passe chez les 'Ngangas', dans les 'Ngandas' ou dans les Eglises, le changement des méthodes managériales, l'appropriation de la science et de la technologie occidentale afin de l'adapter à nos réalités.

    Ce n'est donc pas l'annulation de la dette qui développera le Congo ; mais une transformation sociologique(et psychologique) de nos mœurs et habitudes pour les adapter au monde actuel. Prenons exemple sur les pays émergents qui tout en puisant dans leur tradition(bouddhisme, shintoïsme) se sont emparés de la science occidentale pour se hisser dans la compétition économique mondiale comme des acteurs influents (Chine, Japon…)

    Comme on peut le constater le culturel au Congo bat à plate couture l'économique ! Tous ces aspects traditionnels, religieux et managériales perpétuent la misère dans notre pays.

    Je termine mon argumentaire par ces propos d'Axelle Kabou " La prospérité naturelle des peuples ne se conquiert que sur le terrain de la productivité, de l'inventivité et de la lutte syndicale " Les Congolais doivent en être conscient.

    Kovalin TCHIBINDA

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